Droits de la femme en Islam

Par Pr Oussama Nabil

  • | Sunday, 24 May, 2015
Droits de la femme en Islam

Par Pr Oussama Nabil

Professeur à l'Université Al-Azhar

Directeur général de l'Observatoire de l'Azhar

 

Pour certains, l’Islam est incompatible avec les idées politiques modernes, pour d’autres, la politique est au cœur de l’Islam.

Les deux courants peuvent être justifiés. En fait, tout dépend de la façon dont ils comprennent l’Islam et la politique. Le premier courant peut avoir raison s’il pense que l’islam est une religion qui s’intéresse uniquement à l’aspect dogmatique. Le deuxième courant peut, aussi, avoir raison, s’il croit que l’Islam s’intéresse non seulement à l’aspect cultuel mais aussi à l’aspect social, économique et politique.

            Sans adresser des reproches ou des éloges à l’un ou l’autre, j’ai tendance à suivre le deuxième courant. Sinon, il est inutile de parler des droits de l’Homme en Islam. Il s’agit d’un travail intellectuel par excellence. Dans le Coran, il n’y a pas une sourate ou une partie des sourates consacrée aux droits de l’Homme. Cependant les droits de l’Homme sont partout dans le Coran. Justement, cette présence dispersée exige un travail sérieux pour en déduire des droits, ensuite, les formuler sous forme d’articles ou des clauses, peu importe la forme du document, il est indispensable de penser à une seule chose :

Comment la légalisation musulmane peut-elle s’adapter aux progrès de la civilisation humaine ?

            Dans mon intervention, je ne vais pas me contenter de répéter ce que les islamologues ont déjà essayé de confirmer sur le droit de la croyance, de la vie, de la femme ….etc ou établir une comparaison entre les droits de l’homme en Islam et ceux des documents internationaux, pour montrer que les droits de l’Homme en Islam sont les plus anciens, les meilleurs et supérieurs aux ducuments internationaux. Je ne vais pas non-plus répondre aux préjugés de quelques orientalistes, mal renseigné sur l’Islam. Ce cercle vicieux ne servira pas l’objectif de mon intervention à savoir :

Le vide juridique entre la responsabilité (al- Aqwama) et l’héritage en islam.

al- Aqwama : signifie la responsabilité de l’homme de sa famille (épouse et enfants), elle peut s’étendre aussi sur la grande famille (parents âgés, sœurs et frères).

Cette définition est déduite d'un verset coranique et d'un hadith:

Malheureusement, beaucoup de traducteurs du sens du Coran ont mal traduit ce terme si important. Ils l'ont traduit par autorité et non par la responsabilité. Dans la vie, on peut facilement faire la distinction entre un homme autoritaire et un homme responsable.

« Les hommes sont responsables des femmes, en raison des faveurs qu'Allah accorde à ceux-là sur celles-ci, et aussi à cause des dépenses qu'ils font de leurs biens. Les femmes vertueuses sont obéissantes (à leurs maris)... » Sourate les femmes, verset 19

"Vous êtes tous garants et vous tous responsables de l'objet de votre garde. (...) l'homme est garant de sa famille et responsable de l'objet de sa gard..."

Hadith rapporté par Omar ibn Al-Akhttab

En effet, ce sujet touche, à la fois, le droit de la femme, de l’homme et surtout les enfants.

« Voici ce qu'Allah vous enjoint au sujet de vos enfants : au fils, une part équivalente à celle de deux filles... »  Sourate les femmes, verset

 

Certains courants de pensée accusent l’Islam d’être injuste à l’égard de la femme et favorisent l’homme en lui accordant le double de la part de la femme selon la charia. Les jurisconsultes réfutent ces propos disant que l’homme est responsable de la gestion de la famille sur tous les plans : Dote, responsabilité financière, protection des biens… Bref, l’homme doit assumer la responsabilité de sa femme dans toutes les circonstances. L’homme est également responsable de la formation des enfants. Une responsabilité qui lui coûte très chère sur le plan économique. L’homme pourrait aussi être responsable de ses parents lorsqu’ils sont âgés et ils n’ont pas les moyens financiers ou physiques pour gérer leur affaire. Egalement, l’homme pourrait être responsable de ses sœurs et frères mineurs, de ses neveux en cas de décès d’un de ses frères.

Sur le plan théorique, même rationnel, les principes de l’héritage sont admis, au moins dans la communauté musulmane, parce qu'ils sont justifiés par les principes d'Al-Aqwama, tels qu'ils sont et compris selon le Coran et la Sunna. Où se trouve, donc, le problème? De quel vide parle-t-on?

En effet le vide se trouve entre la théorie et l'application. Alors, on s'interroge sur :

- la position de la loi islamique à l’égard de celui qui fuit ses responsabilités.

- les conditions de la perte juridique de la  qualité de la responsabilité. Ceci nous conduit à poser d'autres questions:

- L’homme irresponsable vis-à-vis de sa famille a-t-il le droit de profiter du privilège que la charia lui accorde, surtout, en matière de l'héritage?

- Ne serait-il pas utile de définir la notion d’Al-Aqawama d’une manière plus évoluée pour qu’elle s’adapte aux problèmes actuels de la société musulmane ?

- Ne serait-il pas utile de faire un code qui prendrait en considération les critères d'Al-Aqwama en appliquant la loi de la succession?

- Les critères d'al-Aqwama ne devront-Ils figurer dans les programmes universitaires des droits de l'homme?

En réalité, mes interrogations ne visent point à faire un changement dans la charia, au contraire, elle a pour objectif d’inviter les jurisconsultes à mieux comprendre la charia pour mieux la codifier. Cet effort souhaité de la part des juristes et des exégètes pourra confirmer l’idée de la validité de la charia pour tout temps et tout lieu, et que l’Islam est à la fois religion et société. Les grandes lignes des droits de l'Homme existent explicitement et implicitement dans le Coran et dans la Sunna, Dieu a confié aux hommes la tache d’en déduire des notions et de les définir de la façon qui convient avec le besoin de la société humaine. Dieu a libéré les êtres humains, je me demande pourquoi certains courants de pensée préfèrent rester enfermer dans la pensée des anciens et refusent renouveler la pensée religieuse.

Les verbes: réflechir, méditer, penser envahissent un très grand nombre de versets coraniques. Enfin, il me semble nécessaire que les musulmans sachent que la réflexion est une obligation en islam aussi importante que les 5 piliers de l'islam. Dieu n'a-t-Il pas dit dans le Coran :

"Sont-ils égaux, ceux qui savent et ceux qui ne savent pas? Seuls les doués d'intelligence se rappellent". S. Al zumar, v. 9.

"Est-ce que sont égaux l'aveugle et celui qui voit? Ne réfléchissez-vous donc pas? S. Al an'am, v. 50.

Print
Categories: L'Islam
Tags:
Rate this article:
4.0

Please login or register to post comments.